Déclaration d'une créance
Vous subissez un impayé de la part d’un débiteur qui vient de faire l’objet d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.
Quelle que soit la nature de la procédure, celle-ci entraîne l’interdiction pour votre débiteur de régler les dettes ayant leur fait générateur antérieurement au jugement d’ouverture, sous peine de nullité du paiement effectué, voire de sanctions pénales pouvant également toucher le bénéficiaire des règlements. Il s'agit en conséquence d'une interdiction légale absolue qui s'impose tant à votre débiteur qu'à vous-même.
Vous devez déclarer votre créance. J'attire votre attention sur le fait que la déclaration de créance équivaut à une demande en justice qui obéit à des conditions de forme et de délai dont le défaut de respect peut justifier le rejet de votre demande.
Auprès de qui ?
Pour que la déclaration produise des effets juridiques, elle doit nécessairement être effectuée entre les mains du Mandataire Judiciaire.
La déclaration doit émaner du créancier lui-même ou de tout préposé ou Mandataire de son choix, justifiant d’un pouvoir à cet effet.
Comment ?
Cette déclaration constitue un acte de procédure judiciaire, elle doit ainsi répondre à certaines exigences de forme.
Elle doit être formulée par écrit uniquement et manifester clairement la volonté du créancier de réclamer une somme déterminée.
Il apparait donc plus prudent d’utiliser la lettre recommandée avec accusé de réception, la date de déclaration est ainsi fixée, pour éviter une contestation ultérieure.
Les déclarations de créance ne sont pas recevables par télécopie ou message électronique.
La déclaration de créance doit comporter les éléments suivants:
- L’identité du créancier déclarant;
- Le montant de la créance due au jour du jugement d’ouverture, qui doit apparaitre clairement et ne doit pas être déterminable par l’interprétation de « documents de renvoi » ou de déclarations successives ambiguës;
- Le montant de la créance pour les sommes à échoir et la date de leur échéance. Le créancier doit non seulement déclarer l’intégralité de sa créance au principal, mais aussi les intérêts et accessoires;
- Concernant les intérêts, la déclaration doit préciser et donc liquider les intérêts courus et arrêtés jusqu’au jour du jugement d’ouverture. A défaut, le créancier ne pourra plus les invoquer quand l’admission des créances deviendra définitive. Il est précisé que par application de l’article L.622-28 du code de commerce, les intérêts, majorations ou pénalités de retard cessent de courir à la suite du jugement d’ouverture, à l’exception des créances relatives à un prêt conclu pour une durée supérieure ou égale à un an;
- Au titre des accessoires il convient de mentionner les dommages et intérêts, les frais, la clause d’indexation, clause pénale etc;
- La nature du privilège ou de la sûreté dont la créance est éventuellement assortie. Le créancier qui omet d’invoquer le caractère privilégié de sa créance encourt le risque de la voir dégénérer en créance chirographaire. Seule une déclaration rectificative effectuée dans le délai légal de déclaration lui permet d’éviter la perte de son privilège ou de sa sûreté;
- L’identification de la juridiction saisie, si la créance fait l’objet d’un litige;
- Une certification. Sauf si elle résulte d’un titre exécutoire, toute créance déclarée doit être certifiée sincère par le créancier;
- A la déclaration doivent être joints, sous bordereau, les documents justificatifs de la créance, ainsi que les documents justificatifs de la sûreté.
- S’il s’agit de créances en monnaie étrangère, la conversion en euros a lieu selon le cours du change au jour du jugement d'ouverture.
La déclaration n’a pas un caractère irrévocable, le créancier a donc en principe la possibilité de la modifier ou de la compléter dans la limite du délai de déclaration. Toutefois la règle qui s’impose est celle d’un respect strict des délais fixés par la loi pour effectuer la déclaration.
Pour les dossiers ouverts à compter du 1er juillet 2014, l'article L 622-22 du code de commerce a été modifié et prévoit désormais que la déclaration peut ête faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix, la possibilité étant donnée au créancier de ratifier la déclaration de créance faite en son nom jusqu'à ce que le juge statue sur l'admission de la créance.
Lorque le débiteur a porté une créance à la connaissance du mandataire judicaire, il est présumé avoir agi pour le compte du créancier tant que celui-ci n'a pas adressé sa déclaration de créance lui - même.
Dans ce cas, l'avertissement que vous recevrez de la part du mandataire judiciaire, précisera que le débiteur vous a porté sur la liste des créanciers prévue à l'article L 622-6 du code de commerce et votre créance sera portée sur l'état des créances, sous réserve de vérification, pour le montant indiqué par le débiteur.
Quand ?
Vous devez effectuer la déclaration au plus tard dans le délai de 2 mois à compter de la publicité du jugement d’ouverture au BODACC.
Le délai expire à la même date du deuxième mois que celle du BODACC dans lequel la publication est intervenue.
- Si vous résidez à l’étranger, vous disposez d’un délai supplémentaire de deux mois ;
- Pour les créanciers titulaires d’une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié, le délai de deux mois court à compter de la notification de l’avertissement personnel.
La déclaration peut bien sûr être faite avant la publication au BODACC, mais le délai court à partir de cette publication.
NB : Pour la date de parution au BODACC, je vous invite à consulter le site, http://www.BODACC.fr.
Comment se déroule la procédure ?
En l’absence de contestation du débiteur ou du Mandataire judiciaire, la déclaration est portée sur l’état de créances qui est signé par le juge-commissaire., sans qu’il soit besoin d’entendre les parties.
Si le débiteur conteste la déclaration de créance, le créancier reçoit de la part du Madantaire Judiciaire, un courrier recommandé contenant le motif de contestation. Il est invité à répondre à cette contestation dans un délai de trente jours, à compter de l’accusé de réception de la lettre qui lui est envoyée.
En l’absence de réponse du créancier, ce dernier s’interdit toute contestation ultérieure et il est réputé avoir admis la contestation de son débiteur et la créance est admise après avoir été portée sur l’état des créances présenté au juge-commissaire. En revanche si le créancier répond et si le débiteur maintient sa contestation, les parties sont convoquées en audience devant le juge-commissaire, auquel il appartient de trancher la contestation. La décision rendue est portée sur l’état des créances.
Le recours sur la décision du juge-commissaire est porté devant la Cour d’Appel.
Les tiers (cautions ou autres créanciers) peuvent former une réclamation auprès du juge-commissaire dans le mois suivant la publicité au BODACC du dépôt au greffe de l’état des créances.
A défaut de déclaration dans les délais légaux:
Votre créance se trouve frappée de forclusion.
Vous pouvez solliciter un relevé de forclusion auprès du Juge Commissaire désigné dans la procédure.
L’action en relevé de forclusion ne peut être exercée que dans le délai de six mois à compter de la publication du jugement d’ouverture au BODACC et le créancier doit justifier que la défaillance n'est pas due à son fait. Le Juge Commissaire est saisi par voie de requête déposée auprès du greffe du Tribunal ayant ouvert la procédure collective.
Pour les créanciers titulaires d’une sûreté publiée ou liés au débiteur par un contrat publié, il court à compter de la réception de l’avis qui leur est donné.
Par exception pour les dossiers ouverts avant le 1er juillet 2014, le délai est porté à un an pour les créanciers placés dans l’impossibilité de connaitre l’existence de leur créance avant l’expiration du délai de six mois précité.
L'ordonnance du 12 mars 2014, a modifié le texte pour les dossiers ouverts à compter du 1er juillet 2014. Le délai d'un an est supprimé. Désormais, le créancier qui justifie avoir été placé dans l'impossibilité de connaître l'obligation du débiteur avant l'expiration du délai de six mois, dispose d'un délai de six mois à compter de la date à laquelle il est établi qu'il ne pouvait ignorer l'existence de sa créance.
Pour les dossiers ouverts à compter du 1er juillet 2014, le créancier relevé de la forclusion dispose d'un délai d'un mois pour déclarer sa créance entre les mains du mandataire judiciaire à compter de la notification de la décision du juge commissaire ayant accordé le relevé de forclusion.
Passé ce délai ultime, votre créance ne peut pas être prise en considération au passif de la procédure et vous ne pourrez plus participer aux distributions de fonds qui pourront intervenir.
En cas d’instance en cours :
Selon les dispositions énoncées à l’article L.622-22 du code de commerce, en cas d’instance en cours au jour du jugement d’ouverture, elles sont interrompues dans l’attente que le créancier déclare sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le Mandataire Judiciaire et, le cas échéant, l'Administrateur Judiciaire ou le Commissaire à l'exécution du plan nommé en application de l'article L. 626-25 , dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.
Le juge-commissaire peut, conformément aux dispositions énoncées à l’article L.624-2 du Code de Commerce, constater qu’une instance est en cours, c’est-à-dire qu’une instance est en cours au jour du jugement d’ouverture.
Dans ce cas si des créances font l’objet d’une instance en cours, la décision de constat a pour effet de dessaisir le juge-commissaire. Il pourra seulement se prononcer sur l’instance en cours, et non plus sur le rejet ou l’admission d’une créance.
Le présent document constitue une fiche à titre indicatif et sommaire. Pour plus de précision, il vous appartient de vous référer aux articles L.622-24 et suivants du Code de Commerce